Technique motos : les moteurs en U

Dans le vaste panorama des moteurs de moto, il existe une catégorie souvent méconnue mais fascinante : les moteurs en U. Ces moteurs, bien que moins répandus dans les cylindrées moyennes, offrent une conception unique et des caractéristiques distinctes qui méritent notre attention. Plongeons dans le monde des moteurs en U pour comprendre leur fonctionnement, leurs avantages et leurs applications.

Dans le domaine des moteurs deux temps, nous rencontrons le moteur à balayage en équicourant, qui est un monocylindre avec deux pistons se déplaçant en sens opposé. La chambre d’explosion est formée par le fond des pistons lorsqu’ils sont au plus près l’un de l’autre, avec la partie cylindre entre eux. Un piston expose les orifices de transfert tandis que l’autre découvre ceux d’échappement. Bien que ces moteurs aient donné d’excellents résultats, ils ne sont pas idéaux pour les motos. Bien qu’il y ait eu un ou deux exemplaires sur des machines de course il y a quelques années, leur utilisation semble avoir été abandonnée en raison des défis rencontrés pour trouver des bougies adéquates. De plus, ces moteurs sont encombrants, nécessitant un vilebrequin à trois coudes et posant des problèmes d’équilibrage, de dilatation, et d’autres. L’alimentation de ces moteurs est également complexe, souvent réalisée par une pompe ou un compresseur volumétrique, ce qui les rend plus adaptés aux cycles Diesel.

Technique motos : les moteurs en U
Analyse comparative des schémas de fonctionnement de deux moteurs 2 temps classiques à 3 lumières : dans le premier, les temps d’ouverture et de fermeture des lumières sont parfaitement symétriques, tandis que dans le second (250 PUCH), les décalages sont significatifs.

Les moteurs en U

Les moteurs comprenant deux cylindres jumelés et une chambre d’explosion commune sont essentiellement des versions repliées sur elles-mêmes des monocylindres à balayage en équicourant, avec la chambre d’explosion positionnée au-dessus des cylindres. Cette forme les qualifie de moteurs en U, ou parfois de « split single » (un mono divisé en deux) selon les Anglais. Cependant, il est plus approprié de les désigner simplement comme des moteurs deux temps en U.

Technique motos : les moteurs en U
Dans la phase d’échappement du moteur en équicourant, le piston descend plus rapidement du côté de l’échappement, ce qui initie le flux des gaz dès l’ouverture de la lumière d’échappement. Au moment où cette dernière s’ouvre complètement, la différence de pression assure le vidage total du moteur.

Le moteur en U présente certaines limitations par rapport à ce que l’on pourrait considérer, en suivant l’ordre alphabétique, comme des moteurs deux temps en I. En effet, lorsque les deux pistons se déplacent ensemble plutôt qu’en opposition, l’équilibre est compromis, nécessitant un équilibrage similaire à celui d’un monocylindre. De plus, tant dans les moteurs en U que dans les moteurs en I, il n’y a qu’un seul temps moteur par tour, ce qui signifie que la régularité cyclique n’est pas nécessairement supérieure à celle des moteurs à deux cylindres fonctionnant selon le cycle à quatre temps. En termes d’équilibrage et de régularité du couple moteur, des moteurs comme le Scott ou le 500 D.K.W. de série surpassent souvent les moteurs en U.

L’objectif principal du moteur en U est de diriger le flux des gaz de manière efficace grâce à la configuration des cylindres, ce qui implique des compromis en termes d’équilibrage et de couple moteur. Bien que cela soit nécessaire, il est important de reconnaître que des solutions alternatives existent, telles que les moteurs à deux cylindres jumelés quatre temps avec un maneton à 360°, qui, bien que théoriquement inférieurs au flat-twin, sont plus faciles à intégrer et bénéficient d’une alimentation plus fiable avec un seul carburateur.

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Disposition des ouvertures dans le moteur E.M.C. Le cylindre avant, à gauche, est dédié au transfert via trois canaux disposés en étoile, tandis que le cylindre arrière accueille les deux conduits : admission et échappement.

Les moteurs en U se prêtent bien à une alimentation par carter pompe, mais cela présente des inconvénients similaires à ceux des moteurs deux temps monocylindres en raison de l’espace mort qui réduit le rendement. Cependant, il convient de noter que les gaz frais pénètrent dans le cylindre en partie grâce à la dépression créée par la sortie des gaz d’échappement, en plus de la pression produite dans le carter par la descente du piston. Opter pour une alimentation par pompe indépendante ou par compresseur éliminerait l’avantage de simplicité et de coût des moteurs deux temps.

Un moteur en U peut être construit de manière assez simple. Dans le cas de la Garelli, par exemple, il n’y avait qu’une seule bielle articulée sur l’axe commun des deux pistons. Cependant, par la suite, des systèmes d’équipages alternatifs ont été préférés pour assurer un décalage précis des phases d’échappement et de transfert des gaz.

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Fonctionnement d’un moteur en U avec bielle principale et biellette articulée (E.M.C. – D.K.W. compétition). (1) L’ouverture de la lumière d’admission se produit bien avant le PMb. (2) La lumière de transfert s’ouvre alors que le piston n’a plus qu’un déplacement minimal à effectuer. (3) L’échappement vient de se fermer et le transfert est encore actif. Cette ouverture se prolonge pendant tout le déplacement de la bielle selon l’angle « S ». C’est cette particularité du moteur en U qui permet la suralimentation selon le système utilisé en compétition par la maison D.K.W. (4) Le piston ferme le transfert presque à mi-course ascensionnelle du moteur, retardant ainsi la fermeture de l’admission, ce qui garantit un remplissage complet du cylindre.

Ce décalage est crucial pour plusieurs raisons :

  1. Pour éviter toute compression qui pourrait s’opposer à l’entrée des gaz frais dans le cylindre, et même pour favoriser leur entrée grâce à la dépression créée par la sortie des gaz brûlés.
  2. Pour empêcher, à la fin de la phase de transfert, que des gaz frais ne s’échappent par l’orifice d’échappement.

Cette précision dans le décalage des phases peut être obtenue en ajustant la synchronisation des mouvements des pistons. Un moyen d’y parvenir est d’utiliser une bielle à fourche, dont la tête attaque le maneton tandis que les bras s’articulent sur les axes des pistons. Cependant, il est nécessaire que l’un des deux pieds de bielle puisse se déplacer latéralement sur l’axe du piston correspondant. Ce pied de bielle peut être une glissière se déplaçant le long d’un axe carré, comme dans le système adopté par Puch.

Une solution plus audacieuse était celle du moteur Trojan, où les bielles étaient constituées de lames présentant une certaine élasticité. Bien que ce système soit rudimentaire, le moteur fonctionnait efficacement à un régime lent. Malgré son âge avancé, une voiturette Trojan a même obtenu de bons résultats dans les épreuves de régularité britanniques.

Cependant, la plupart des constructeurs préfèrent utiliser une bielle principale sur laquelle une patte est fixée, où l’autre extrémité de la bielle tourbillonne. Cette dernière décrit un mouvement ovale, assurant ainsi le décalage nécessaire des phases dans le moteur en U.

Technique motos : les moteurs en U
Voici un autre type de moteur en U où les deux pistons se déplacent simultanément. Le balayage est en équicourant, mais les temps de distribution ne sont pas décalés. Il s’agit d’un modèle présenté au Salon de l’Automobile de Genève par la société allemande T.W.N. La configuration de la bielle en fourche est particulièrement remarquable, car dans le modèle « Hérisson » d’avant-guerre, la société utilisait deux bielles distinctes pour un système de balayage similaire.

Quelles sont les performances attendues d’un moteur en U en utilisation quotidienne ? 

On peut s’attendre à des performances à peu près équivalentes à celles d’un bon moteur à culbuteurs de caractéristiques moyennes, c’est-à-dire entre 105 et 110 en solo pour une cylindrée de 360 cm³, et entre 115 et 120 pour une cylindrée de 500 cm³. Comme pour tous les moteurs deux temps, la courbe de puissance est linéaire, offrant une grande souplesse en charge, des accélérations vives, et une efficacité remarquable en côte. Ce moteur fait preuve d’une grande robustesse et s’adapte aisément aux travaux exigeants. Sa puissance maximale est atteinte à un régime relativement bas et avec une faible vitesse linéaire des pistons, ce qui contribue à sa durabilité.

L’absence d’organes de distribution non seulement réduit les risques de pannes, mais facilite également la construction du moteur. Par exemple, il pourrait adopter une configuration avec un bloc en alliage léger comportant des chemises pour les cylindres, ainsi qu’un carter monobloc avec deux couvercles latéraux robustes pour soutenir les roulements du vilebrequin composite. La culasse serait également en alliage léger. Étant donné la rareté actuelle de l’acier, l’utilisation d’alliages légers est recommandée chaque fois que possible. Un tel moteur serait compact, facile à usiner et économique à produire.